Bientôt une nouvelle exposition!

(texte de Vincent Verlé, commissaire d’exposition)

Le rythme de l’art contemporain est scandé par les expositions. Chaque semaine, c’est plusieurs centaines d’expositions qui s’ouvrent à travers le monde. Chaque exposition traite d’une question, d’un thème défini par l’artiste, par le commissaire. Bientôt une nouvelle exposition! n’échappe pas à cette règle tacite, à la différence que c’est le lieu qui a défini le sujet, non les artistes ou le commissaire.
Lorsque Alexandra David et Sophie Usunier m’ont parlé de leur projet de résidence à Notre Maison, j’ai tout de suite été séduit par cette idée. Mon travail de commissaire d’exposition au Centre d’Art Bastille de Grenoble m’a conduit à interroger l’importance de la place du public dans la définition dans l’art. Dès
le départ, le CAB a placé l’action de médiation au cœur de son travail. Cela ne veut pas pour autant dire que l’action que je mène au CAB se place dans le champ de l’action socioculturelle. Bien au contraire, le CAB se place dans le champ de l’art contemporain, dans l’exploration des questions traversant l’art aujourd’hui.
Mon travail avec Alexandra David et Sophie Usunier est dans la droite ligne de ce que j’ai entrepris depuis plusieurs années car il s’agit non pas de proposer une exposition à un public, mais d’apporter l’art contemporain au cœur d’un public, celui des occupants de Notre Maison.
Être en résidence dans une maison de retraite, ce n’est pas faire de l’animation, c’est écouter, ressentir, exprimer. Exprimer un point de vue sur une question importante de notre société, la question de la vieillesse. Dans cette course infernale du temps qui passe, la question de la vieillesse a été éclipsée par
celle de la jeunesse, voir du jeunisme. Aujourd’hui, il nous faut être jeune, beau, actif pour être séduisant, attractif. On pratique le sport à outrance, la chirurgie esthétique pour ne pas apparaître dépassé, pour ne pas apparaître vieillissant. La vieillesse est devenue le mal absolu, synonyme de décadence, de dégradation, de fin, de mort. Or la vieillesse n’est pas que cela. Elle fait partie de notre processus de
vie, c’est inéluctable. Pourtant nous continuons à la mettre au rebut, à la repousser. Nous oublions que l’organisation de nos sociétés ont toujours été basée sur la place laissée à nos «anciens». Ce sont eux qui ont le vécu, la sagesse pour nous guider. Mais peut-être qu’aujourd’hui, nous avons oublié cette sagesse dans notre folie. Car finalement, le sort que nous réservons à nos vieux aujourd’hui est le sort que nous réservons à nos peurs. Peur de la mort, peur de la déchéance, peur de la folie.
L’exposition qu’ont conçue Alexandra David et Sophie Usunier parle de cela. Ce n’est pas un travail sur Notre maison, c’est un travail sur la vision de la vieillesse à Notre Maison. Un travail qui regarde sans concession la place de la vieillesse dans notre société.

Vincent Verlé est commissaire d’exposition et responsable des publics au Centre d’Art Bastille.

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